Vous ne vous reconnaissez pas dans les cérémonies d'obsèques religieuses ? Vous souhaitez quelque chose de différent et avec du sens ? Vous êtes persuadé qu’il est possible de dire adieu simplement mais pourtant avec dignité et élégance ?
Comment faire ses adieux grâce à une cérémonie laïque (appelée aussi cérémonie civile) qui soit spirituelle, mais sans religion ? Il existe aujourd’hui de multiples alternatives aux funérailles traditionnelles et religieuses. L’essentiel est de ne pas passer à côté de cet ultime au revoir. Il est tout à fait possible de créer un moment sacré, avec de nouveaux rituels, simples et empreints de sérénité. L’opportunité d’une parenthèse où spiritualité et intimité s’entrelacent pour laisser place à la mémoire.
Des obsèques peuvent devenir un moment profondément sacré et rassembleur pour les proches en dehors de toute référence religieuse. Pourtant, il n’est pas aussi évident de dissocier les religions de la notion de ce qui est sacré. La définition même du sacré, extraite du Larousse, exprime en effet bien ce lien tenace avec le religieux : « qui appartient à un domaine interdit et inviolable (par opposition à profane) et fait l'objet d'une vénération religieuse. »
Qu’entendons-nous donc par « sacré » dans le rituel de la cérémonie dite laïque ? Nous pourrions peut-être l’accoler ici à la grâce :
Pour Audrey Gourlaouen, maîtresse de cérémonie et conseillère funéraire L’autre rive Rouen : « Notre rôle, en tant que pompes funèbres, est de semer de petites graines, de donner des idées, d’inviter les familles à se questionner. Bon nombre de gestes d’adieu ne coûtent rien de supplémentaire aux frais des funérailles. Ne pas passer à côté de la cérémonie d’obsèques est essentiel, car il n’y en a qu’une ».
Ce moment d’adieu, même sobre, peut devenir un temps d’union pour les proches. Il ne s’agit pas seulement de rendre hommage au défunt, mais aussi de permettre à chacun de vivre des émotions personnelles dans un partage collectif. Que ce soit par le choix :
chaque geste a la capacité d’unir les proches et de donner du sens à ce moment unique.
Il n’est jamais facile de valider efficacement nos actions dans le temps présent d’organisation d’obsèques. Il y a parfois un écart entre les paroles explicites ou implicites laissées par le défunt et les attentes, souvent non exprimées, de ses proches. Comment savoir ?
Lorsque le défunt affirme « Ne faites rien pour moi », il est possible que ce soit une manière de vouloir éviter d’imposer ou de déranger, sans pour autant nier le besoin d’un moment d’hommage. À l’inverse, ce souhait peut aussi traduire une réelle volonté de sobriété, un choix pleinement assumé.
Pour les familles, cette ambiguïté peut être source de questionnements, parfois de doutes, sur la justesse de leurs décisions. « Est-ce que j’ai bien fait ? ». Ces interrogations mettent en lumière l’importance de concevoir des adieux qui résonnent avec authenticité et émotion. Car au-delà de la grandeur ou de la simplicité d’un hommage, c’est la sincérité du geste qui compte.
Dans l’ouvrage de la fondatrice d’Happy End publié en 2021 : « Un enterrement comme je veux ! Le premier guide pratique des obsèques civiles », Sarah Dumont propose quelques questions pouvant aiguiller les proches lorsque ces derniers ne savent pas vraiment vers quoi se diriger pour la cérémonie de leur défunt : « Essayez de poser sur papier ce qui le caractérisait. Quelles étaient ses passions ? Ses hobbies ? Les lieux où il/elle aimait se ressourcer ? Quelle était sa couleur préférée ? Était-ce un(e) grand(e) solitaire ou un grand(e) mondain(e) ? Était-il/elle investi(e) dans une cause ? Qui étaient ses ami(e)s les plus proches ? »
Comme le souligne Audrey Gourlaouen : « Quand l’adieu est beau, même simple, il apporte un véritable soulagement. On se dit alors : “Nous avons fait ce qu’il fallait” ». Cette recherche « du beau » - qu’il s’agisse de mots, de musiques ou de gestes - n’est pas une question de perfection, mais bien de toucher à l’essentiel. Elle reflète une quête d’élévation, d’émerveillement et de soulagement, profondément liée à la spiritualité.
Respecter les volontés du défunt est bien sûr prioritaire, mais il est important de ne pas négliger les besoins émotionnels de ceux qui restent. Notre accompagnement à L'autre rive consiste à prendre autant soin des familles vivant le deuil de leur proche que du défunt.
Si la quasi-totalité des Français (88%) sont angoissés à l’idée de la mort, 49 % redoutent leur propre mort.
Le jour de la cérémonie de crémation ou d'enterrement civil, l’absence de rituel ou d’adieu peut rendre le deuil encore plus éprouvant pour la famille et les proches. Les gestes d’au revoir offrent un premier repère essentiel pour amorcer le cheminement du deuil. Le temps pouvant, par la suite, apaiser la douleur ressentie.
Tanguy Châtel, sociologue*, nous indique que dans une époque très matérialiste comme la nôtre, la cérémonie tend à clamer l’importance des symboles en lien avec les forces de l’esprit du défunt. En effet, tout n’est pas que matière.
L’être humain ressent ce besoin de célébrer ses défunts, bien au-delà de la simple disparition physique. Les religions ont su construire des cérémonies et rites funéraires pour préserver la mémoire du défunt et aider les vivants à surmonter leur perte. Comment les aider à se relancer dans la vie ensuite ? Le sociologue explique : « Aujourd’hui, en ayant rejeté l’ensemble du patrimoine religieux en matière de cérémonie funéraire, les cérémonies se sont appauvries. On les a recentrées sur des symboles très primaires qui ne font pas toujours sens pour tout le monde et qui s’adressent énormément au défunt, délaissant les vivants et leur besoin d’être accompagnés ».
Jacques Salomé, psychosociologue et écrivain déclare d’ailleurs : « Ces rituels, ces manifestations pour achever une relation, pour terminer l’inachevé d’une relation qui a été essentielle pour nous, sont vitaux pour ceux qui restent, pour ceux qui à leur tour vont “passer en première ligne”, se rapprocher du passage d’une façon ou d’une autre. »
* Tanguy Châtel est spécialisé dans la recherche sur les soins palliatifs et dans la sociologie des religions, membre du comité national d'éthique du funéraire, et chargé de mission à l'Observatoire national de la fin de vie.
Depuis 2008, la proportion de Français souhaitant une cérémonie religieuse pour leurs obsèques a chuté de 15 points, tombant à 40%. En délaissant les rites religieux traditionnels, nombreuses sont les personnes qui recherchent des alternatives plus personnelles et intimes, que ce soit pour une crémation ou un enterrement. Ainsi des gestes simples et symboliques viennent remplacer les cérémonies classiques pour honorer le souvenir du défunt et offrir aux proches un adieu qui leur ressemble. Plus qu’un hommage, ces gestes deviennent des repères qui aident à dire au revoir sans regret et à sublimer l’absence des attentions empreintes d’humanité.
Prenons l’exemple des enfants et des jeunes adultes : lorsqu’ils perdent un proche, il y a un besoin instinctif de rendre hommage lors de la cérémonie. « Pour les plus jeunes qui vivent un tel bouleversement, lors de la cérémonie ils sont là sans vraiment l’être. Contrairement aux adultes, les plus jeunes s’affranchissent des codes et des attentes sociales : ils ne se demandent pas ce qu’il faut faire ou ne pas faire, mais laissent leur cœur parler » nous confie Audrey Gourlaouen.
Bien qu’ils puissent percevoir cet événement comme confus, voire écrasant, la cérémonie devient pour eux un moment unique. Ils expriment leur amour avec une grande sincérité pour commencer à appréhender la réalité de la séparation. « Je me souviens d’une cérémonie d’obsèques particulièrement émouvante, organisée par des petits-enfants pour leur grand-père. Les parents s’étaient laissés guider par leurs idées. Les jeunes ont su sortir des cadres habituels pour créer une cérémonie qui leur ressemblait. Ils ont exploré de nouvelles idées et, après avoir saisi les étapes essentielles d’une cérémonie, y ont ajouté leur touche personnelle. Le résultat fut à la fois beau, et profondément puissant, un hommage d’une authenticité marquante pour tous les présents aux obsèques », évoque Audrey Gourlaouen.
Accepter de vivre pleinement ce moment, même s’il est douloureux, c’est reconnaître la perte pour mieux se reconstruire par la suite.
Un dernier hommage, aussi discret soit-il, est une étape essentielle dans le processus de deuil, qui aide chacun à avancer, à sa manière et à son rythme. « Si l’on devait remplacer le mot « spirituel », j’opterais pour « intériorité ». Entre cérémonie religieuse ou laïque, aujourd’hui le choix est libre et les rituels associés également » poursuit la conseillère funéraire.
Elle raconte ces autres obsèques civiles : « Lors des obsèques d’un amateur d’opéra, sa fille a souhaité organiser la cérémonie à l’image d’un mariage laïque. Ils avaient choisi le jardin familial pour la célébration. L’assemblée était assise en écoutant une chanteuse lyrique accompagnée d’un duo de musiciens, pianiste et trompettiste. Puis, pour tenir compte des différentes façons dont chaque membre de la famille souhaitait rendre son hommage, pour la petite-fille du défunt âgée de 2 ans, une histoire pour enfant a été comptée par une lectrice en tournant les pages du livre face aux personnes présentes, avec pour thème, le départ, l’accompagnement et l’au revoir. »
Néanmoins, comment trouver sa place lors d’une cérémonie d’obsèques, quelles qu'elles soient ? Il n’est pas toujours facile de trouver la juste place en tant qu’ami, collègue ou autre relation du défunt lorsqu’une cérémonie est orchestrée uniquement par la famille proche. Les obsèques sont avant tout des moments d’union. Il est essentiel de créer un espace fédérateur où chacun, au-delà du cercle familial, puisse participer et s’ancrer dans l’instant.
Cela peut être au travers :
Tanguy Châtel a pu observer que si les religions sont en perte de vitesse, le besoin de spiritualité lui est en développement assez rapide. Pour autant, cette approche spirituelle ne se retrouve pas complètement dans les valeurs républicaines comme pourrait le proposer une cérémonie funéraire laïque à l’image d’un baptême républicain (appelées, alors, des obsèques républicaines). « Il peut manquer un lien d’amour dans des cérémonies civiles » complète Audrey Gourlaouen.
Des pratiques peuvent être adaptées sous forme de rituels paisibles, permettant aux familles de recréer un espace méditatif pendant la cérémonie. En France, l’influence culturelle de rites funéraires venus d’autres pays ou cultures est de plus en plus significative. Une dynamique faisant écho aux cérémonies indiennes ou mexicaines où la mort est pensée comme une transition plutôt qu’une fin. La célébration unit ainsi les vivants et les défunts. Les maîtres de cérémonie peuvent intégrer :
Cela offre une forme de recueillement spirituel respectant les valeurs personnelles de chacun.
Dans la culture indienne, les funérailles sont des événements profondément spirituels qui célèbrent la transition de l’âme. En effet, il est admi d’avoir des offrandes symboliques comme des fleurs, des bougies, ou de l’encens, illustrant le voyage de l'âme vers un nouvel état.
Dans la même vision, el Día de los Muertos, de la tradition mexicaine, se concentre sur la célébration de la vie du défunt avec des décorations vibrantes et des offrandes. Ce style d'hommage joyeux a gagné en popularité dans les cérémonies laïques en France. Les familles intègrent par exemple :
« On observe que les familles explorent de nouvelles façons d’aborder les cérémonies d’obsèques. Ces pratiques restent encore marginales et n’aboutissent pas toujours à des démarches pleinement personnalisées. Souvent, les proches tendent à reproduire les rituels qu’ils connaissent ou ont déjà expérimentés, ce qui freine parfois l’évolution vers des pratiques inspirées de différentes cultures ou de démarches plus intimes. Toutefois, on constate que de plus en plus de familles osent intégrer des éléments uniques marquant ainsi un changement progressif dans les rituels funéraires » constate Audrey Gourlaouen lors des cérémonies de crémation ou d'enterrement laïques qu'elle organise.
Comme l’affirme à nouveau Sarah Dumont suite aux obsèques de son papa, d’ailleurs organisées par L’autre rive Paris : « Nous sommes nombreux à ne plus vouloir entrer dans le moule, à souhaiter donner une résonance joyeuse et légère à ce dernier hommage, à faire régner la vie en maître. Cette évolution bouscule le rôle des professionnels du funéraire : ils ne peuvent plus nous proposer une prestation standard. Ils doivent répondre à notre quête de sens et nous offrir une prise en charge plus humaine de la mort. » *
* Sarah Dumont évoque d’ailleurs L'autre rive avec enthousiasme dans la préface de son ouvrage : « Un enterrement comme je veux ! Le premier guide pratique des obsèques civiles » - Éditions Eyrolles, 2021.
Une crémation ou un enterrement civil ne se définit pas en opposition à une cérémonie religieuse, mais comme une occasion unique de se rassembler autour de l’instant présent. Imaginez comme un espace pour rendre hommage à la vie du défunt, à son parcours, et aux souvenirs précieux partagés avec ses proches. Plus qu’un simple adieu, cette cérémonie constitue un moment intensément personnel, conçu pour refléter l’essence de celui ou celle qui nous a quitté, tout en intégrant la dynamique propre à sa famille et à ses relations.
Ce type de funérailles répond également au besoin universel de ritualiser la perte. Un besoin qui dépasse le cadre des obsèques et peut nourrir un processus de deuil plus large, s’étendant bien au-delà du jour même. « Certaines familles instaurent des rites funéraires pour nourrir le lien, comme mettre une assiette à table en mémoire au défunt ou laisser un verre au moment de trinquer lors des grands rendez-vous de la famille » confie la maîtresse de cérémonie de l'agence L’autre rive Rouen.
Comment conserver ce lien si fort et l’enrichir de gestes symboliques ? Pourquoi ne pas se donner rendez-vous pour se souvenir et honorer la mémoire du défunt à des dates anniversaires ou qui font particulièrement sens pour les proches du défunt ? Il s’agit là encore de maintenir un lien symbolique avec la personne disparue dans la joie et l’espérance.
« La mémoire, comme le rêve, dilue les couleurs, la mémoire est comme une photographie exposée au soleil ». José Carlos LLOP, écrivain espagnol.
Source des données en chiffres : Enquête Plaquesdeces.fr/Ifop 2023
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